Ces vêtements qui nous représentent
Aurélia Dumté
2023-03-18T07:00:00.0000000Z
2023-03-18T07:00:00.0000000Z
Les Nouvelles Caledoniennes

https://lesnouvellescaledoniennes.pressreader.com/article/281741273651045
ECONOMIE
La tenue vestimentaire représente une grande part de notre identité. Que l’on soit discret, classique ou exubérant, que l’on montre notre rattachement à une mode, à un mouvement, à une cause… Les vêtements parlent pour nous. Il est donc normal que des marques de vêtement locales émergent pour représenter la population calédonienne dans son unicité. Les vêtements ont un rôle social essentiel. Ils permettent de se protéger (du soleil, du froid, du regard…), mais surtout d’appartenir à un groupe. D’un regard, l’autre obtient des informations : genre, origine sociale, tendances culturelles, appartenance ethnique ou géographique. Le vêtement tient donc une place prépondérante dans notre société, et ce depuis que l’Homme s’habille ! Le vêtement permet de s’approprier sa culture, son identité, et de l’exposer aux regards de tous. Il est donc tout à fait normal que dans chaque pays, des personnes créatives lancent leurs marques de vêtements. La Nouvelle-Calédonie ne fait pas exception. « Avant, il n’y avait que les magasins de Chinatown qui vendaient des paréos, des t-shirts locaux, avec des dessins plutôt polynésiens, qui étaient importés de Chine,» se souviennent les créateurs. Certains artisans se sont approprié ces bouts de tissu pour y imprimer leur identité, l’identité de tout un pays. En 1992, naît la marque Tricot Rayé. Un petit serpent mortellement mignon et humoristique. Un symbole qui va tenter de réunir toutes les ethnies, avec des dessins emblématiques comme la Tricot rayé family où, de façon très cliché, différents groupes ethniques et sociaux sont représentés. « Nous sommes obligés de garder ce dessin, il est très demandé », sourit Romain Vassilev, gérant de Les Marques calédoniennes du groupe TeePrint. Déjà, en 1979, le père de Romain et fondateur de TeePrint, imprime des t-shirts à l’effigie de sa propre marque : Esprit de Nouvelle-Calédonie, dont l’emblème, un cagou stylisé, est toujours bien ancré dans l’inconscient calédonien. En 1988, c’est Marilyne Le Beuze qui se lance à l’assaut du monde du textile. « C’était l’époque des Évènements. Mes premiers clients, c’étaient des gendarmes qui repartaient. » Après les t-shirts aux paysages calédoniens peints à l’aérographe, Marilyne a monté Lyne création, une marque de vêtements reprenant les codes des Arts du Pacifiques et des tenues traditionnelles. « J’habitais dans des quartiers populaires, Rivière-Salée, Vallée-du-Tir… C’était normal de faire des robes missions. Ma première robe, quand je l’ai vue portée par la cliente, elle était belle ! La cliente rayonnait, elle se sentait belle dans cette robe, et elle avait raison. J’ai gardé ce modèle de la double volants pendant des années. » Lyne Création a beaucoup grandi, mais garde son côté artisanal. Marilyne se doit, elle aussi, de maintenir certains motifs, comme « La forêt de nautiles », que le Calédonien reconnaîtra en un clin d’oeil. Comme des symboles indétrônables, ces dessins ont marqué des générations de locaux et deviennent inévitables. UN SYMBOLE Dans les vêtements, c’est justement le symbole qui est recherché. Tricot Rayé a pris une part importance dans les rituels calédoniens. « C’est une marque familiale, avec les naissances, les mariages, les cadeaux souvenir… » constate Romain Vassilev. À la naissance, bébé reçoit un doudou Tricot Rayé, une grenouillère à l’effigie du petit serpent ou une serviette brodée. Quand la famille ou les amis sont en visite sur le Caillou, quand les Calédoniens partent à l’étranger, c’est Tricot Rayé que l’on plie dans les bagages. « Maintenant, ce que nous aimerions, c’est que l’on ne soit pas seulement fier de l’offrir, mais aussi de le porter. » Romain Vassilev imagine Tricot Rayé prendre son envol, « comme ces marques régionales qui s’exportent : À l’aise Breizh ou Pardon à La Réunion. » Alors que créer une marque locale est quasi-une nécessité, un besoin essentiel ressenti par les habitants comme par les visiteurs, le vivier de clients sur le Caillou reste minime, et ne permet pas toujours aux créateurs de vivre de leurs marques. Lyne création, en plus de sa ligne grand public, répond également à des besoins spécifiques : uniformes professionnels, mariages coutumiers. Lorsque TeePrint a racheté Tricot Rayé, en 2010, « la marque était uniquement textile et en passe de devenir ringarde, » se souvient Romain Vassilev. Il a fallu renouveler les designs, les coupes, les couleurs, et lancer d’autres marques pour se maintenir à flot : Terre d’origine, Stockmen sont arrivés sur le marché. Et même s’accoler à d’autres produits, comme les mouchoirs, les yaourts, ou travailler avec des établissements comme des hôtels ou des crèches. COMBLER UN MANQUE En novembre 2022, au centre-ville de Nouméa, une nouvelle boutique fait son apparition : Héritage Kanak, une ligne de vêtements imaginée par trois soeurs lors de leurs études en France. Elles qui déjà rêvaient de marques de vêtements « dans lesquelles on se retrouvait », se souvient Nelly Mapou, aujourd’hui une des trois associés. Étudiantes, elles veulent s’habiller « avec des vêtements qui nous correspondent ». Elles réalisent quelques dessins, les premières maquettes, et font floquer quelques t-shirts. « C’était très familial. Puis, en 2016, on a créé une page Facebook. » C’est le succès. « L’univers d’Héritage Kanak, c’est de déconstruire les stéréotypes, les préconçus que l’on voyait dans les boutiques du quartier chinois. L’idée c’est de valoriser les éléments essentiels et la beauté de notre culture, de notre patrimoine. Nous avons choisi la hache car c’est un objet de prestige. » t-shirts imprimés, mais aussi chemises et I
fr-nc